Cent cinquante ans après la publication des « Misérables », Serge Pauthe et ses amis restituent sur scène les chefs d’œuvre de poésie et d’art oratoire de son auteur dans un spectacle éminemment politique qui interroge le temps présent. En ces temps électoraux où « La République » est sur toutes les bouches, mise à toutes les sauces, ce Victor Hugo là remet bien des choses à leur place et confirme à ceux qui en doutait encore que VICTOR HUGO, C’EST MAINTENANT !
Au cœur d’un livre d’histoire
Nous sommes au cœur d’un livre d’histoire. Le 15 juin 1849, ouverture d’une séance de l’Assemblée Législative de la seconde République qui a tout juste un an. A l’ordre du jour, la prévoyance et l’assistance publique. Un orateur prend la parole et déclare tout de go vouloir « abolir la misère ». C’est Victor Hugo. En face on tempête, on s’indigne. Adolphe Thiers vitupère, le chef du gouvernement ronronne, le comte de Falloux s’étrangle et Léo Ferré en appelle à « Madame la Misère ». Hugo insiste, sa voix monte comme une houle qui vient du plus profond de la conscience humaine, un résistant de la dernière guerre se rappelle les chants de liberté du poète, le président est débordé, le sténographe y perd son latin, Gavroche rigole, prend des claques et finalement se retrouve par terre, c’est la faute à Voltaire…
La république Hugolienne par vents et marées
Le spectacle poétique et théâtral « Place Victor Hugo : Direction République » qui fut donnée à deux reprises devant des salles combles vendredi 9 mars à la Maison de Pays dans le cadre du festival « Nyons en scène » (une représentation scolaire dans l’après midi et une publique le soir), a fait voguer le bateau de la république hugolienne à travers deux siècles d’histoire. Conduit de mains de maître par le capitaine auteur, comédien et metteur en scène Serge Pauthe, un équipage de 6 comédiens hyper-vitaminés se partageant 22 rôles, a entraîné le public depuis l’inauguration burlesque par le maire d’une salle Victor Hugo de village, jusqu’aux barricades des insurrections de décembre 1851 consécutives au coup d’état de Louis Napoléon Bonaparte rétablissant l’Empire.
un équipage de 6 comédiens hyper-vitaminés
A travers la tempête aux multiples tableaux, Philippe Altier incarne avec une formidable énergie Victor Hugo, le poète, le tribun de la seconde république mais aussi l’insurgé, le défenseur de toutes les libertés, l’adversaire de toutes les injustices. Face à lui, dans un combat qui le condamnera à l’exil pendant 19 ans, ses ennemis sont Adolphe Thiers (le tonitruant Alain Bosmans), le Comte de Falloux (le savoureux Serge Pauthe), le Général Marquis de Hautpoul (Jean Pierre Yvars qui remplaçait au pied levé avec brio Jean Louis Deville) et l’évêque de Langres (l’inénarrable José Sanchez-Gonsalvez). Ses amis ont pour nom le député de gauche Louis Baudin (formidable de conviction Jean Louis Debard), le révolutionnaire Blanqui, le sténographe de l’assemblée, deux huissiers et un résistant de la dernière guerre qui se rappelle les chants de liberté du poète.
Un spectacle qui brule les planches
Et vendredi soir à Nyons le spectacle aura connu de nouveau, après Valréas et Buis les Baronnies, les faveurs d’un public enthousiaste devant le souffle du propos. Mélangeant la poésie et l’histoire, la comédie et le drame, le théâtre, le chant et la musique, la pièce aborde des thèmes d’une brulante actualité… Et ce n’est pas le moindre mérite du spectacle que de démontrer que Victor Hugo, 127 ans après être entré au Panthéon en même temps que dans notre mémoire collective, continue en 2012 dans les Baronnies, à brûler les planches.
Prochaines représentations: le vendredi 23 mars à 20h30 dans l’amphithéâtre du nouveau Lycée de Vaison-la-Romaine, cité scolaire, rue Marcel Pagnol. Ouverture de la salle à 20h, réservation sur place
Alain BOSMANS
Article partiellement paru dans le Dauphiné Libéré du 11 mars 2012