La Création artistique
" Faire une œuvre c'est se faire renaître en elle. Avec mes boules
pour toute tête, mes textes pour tout corps, je suis tout entier moi-même...
Fabriquer des boules et des couples, écrire des textes sur les yeux
et " Je t'aime ", ce n'est pas un travail que nous avons choisi pour
gagner notre vie ? c'est le travail lui-même qui nous a choisi pour
vivre, exister et être ce que nous sommes… Si je suis fabricant de boules
et de texte sur les yeux, c'est parce qu'il a fallu inventer ma vie
afin de ne pas être perdu sur la terre et pouvoir être en harmonie avec
elle… Faire une boule et toucher la terre, écrire sur les yeux et voir
le ciel, suivre le mouvement du globe tout autour du feu, être sans
cesse en accord avec lui : faire la nuit et le jour quand je veux :
une boule pour tourner dans l'obscurité, un texte pour tourner dans
la lumière… Car il ne s'agit pas d'être un écrivain et/ou un artiste,
mais simplement d'être un être qui puisse sentir le monde afin de pouvoir
mieux le penser pour mieux exister en lui… Et quand on me demande si
je vais encore continuer longtemps comme cela avec ces boules, je pense
tout de suite au soleil à qui j'ai envie de demander si lui aussi il
pourra un jour s'arrêter de brûler ! Car je brûle, je me consume ! Ces
boules, ces textes ne sont produits que pour la combustion de mon corps…
Et j'écris sur les yeux des textes qui éclairent les boules que je fais
comme le soleil éclaire la terre… !
Les Boules et l'éboulement
" La boule est le seul volume qui, au point de vue de l'harmonie,
supporte le désordre le plus mouvementé de son rangement alors que n'importe
quel autre volume nécessiterai un ordre, une discipline. Seules les
boules entassées en désordre exigent une variété de tailles infinie…
La sphère est le seul volume qui soit prêt à s'avancer tout seul dès
qu'on le touche, le lâche ou le frôle, trouvant sa vitesse en roulant
sur lui-même… La boule est un volume instable, toujours en fuite et
qui revient toujours de très loin… Je suis fasciné par la sphère parce
que j'ai compris qu'elle est la vie… Je tourne autour de ce volume qui
n'a pas de sens, qui n'a ni face ni dos, ni dessus ni dessous parce
qu'il est sans cesse en mouvement. L'éboulement n'est qu'un tableau
qui se serait effondré… La nature est le plus grand éboulement que nous
ayons sous les yeux. "
Les Textes sur les yeux
" Les textes sont sortis de ma tête, les boules sont sorties de mes
mains. Si avec les mains, je fais des boules, avec la tête je fais des
textes sur les yeux… Je n'ai jamais écrit qu'un seul texte, toujours
le même. S'il est des milliers de fois répété sans qu'aucun ne lui ressemble
jamais, c'est parce que ce texte existe dans un espace sans fin… J'écris
sur les yeux, mais les yeux sont deux ; ils sont deux petites boules
qui s'accouplent jusqu'à n'en faire plus qu'une pour y voir… Et nos
yeux sont les seules boules qu'il reste de ce monde que nous avons mis
en boules pour le projeter vers les autres et leur faire signe dans
le silence… "
"Je t'aime… "
" Je crois que toutes mes boules sont des œuvres avec Titi… Dans
mon travail, il y a le travail de Titi, dans le travail de Titi, il
y a le mien. Car nous vivons ensemble, nous nous aimons, nous nous accouplons.
Notre travail à chacun c'est nous. Nous sans notre travail c'est n'importe
qui d'autre que nous… Vivre ensemble, c'est aussi pouvoir participer
au travail de l'autre… "
Textes et propos recueillis par Alain Bosmans