Dans l’objectif de mutualiser les besoins, compétences et idées dans le domaine de l’accès au soins dans notre région, le maire de Buis Jean Pierre Buix et le président du syndicat mixte des Baronnies Provençales Hervé Rasclard avaient invité le vendredi 11 février dernier à Buis l’ensemble des élus, professionnels de santé et responsables régionaux et départementaux de la santé, à échanger autour de la problématique de la désertification médical en milieu rural, On y notait notamment la présence d’Alain Chabrolle, vice président du conseil régional Rhône-Alpes en charge de la santé, Pierre Pienek, vice président du conseil général de la Drôme, Jean-François Jacquemet, délégué territorial de l’ARS de la Drôme, Claude Leicher, président national du syndicat des médecins généralistes de France, Denis Gaudin, sous-préfet de Nyons, Michel Grégoire, vice-président du conseil régional Rhône-Alpes., des responsables de la MSA, de la CPAM et du RSI ainsi que de nombreux maires et acteurs de santé.
Un diagnostic et des solutions
Au-delà de la situation des Baronnies Provençales qui constituent pour Claude Leicher « un bon endroit pour étudier la vrai vie de la médecine de proximité notamment dans les cantons de Séderon et la Motte Chalencon où la situation est grave », la réunion permit d’aborder les problèmes de fond que pose l’évolution de la profession de généraliste et les contraintes d’une médecine de proximité de plus en plus complexe. Elus, personnels de santé et représentants de l’Etat sont d’accord sur le constat : Les erreurs pendant des années de la limitation du numérus clausus des étudiants en médecine, le vieillissement et la féminisation de la démographie médicale, l’évolution des modes de vie et des mentalités favorisant les zones urbaines au détriment des campagnes et le profond malaise des généralistes furent soulignés par tous.
Pour les solutions Jean François Jacquemet pour l’ARS de la Drôme confirmait que « le projet régional de santé inclue un volet concernant la médecine de proximité et la médecine ambulatoire ». Puis il développait, à l’aide d’un « power point », les différents outils qui devraient permettre d’améliorer l’accès aux services de santé dans les zones où il se précarise. Il s’agit notamment :
– De la mise en place « d’engagements de service » pour les étudiants en médecine (mis en service fin 2010 et qui est prometteur).
– De la mise en place d’un nouveau mode de rémunération des généralistes (expérimenté dans 16 sites en Rhône Alpes).
– Du développement de la télémédecine et de la télésanté.
– De la mise en place d’un service unique d’aide à l’installation des médecins.
– De la création de Maisons de Santé Pluridisciplinaires (en Rhône Alpes 50 sont en réflexion, 70 en projets, 6 en constructions et 14 opérationnels) et de pôles de santé (2 en place à ce jour en Rhône Alpes, l’un dans la Loire avec 16 professionnels et l’autre dans l’Ain avec 38 professionnels).
Le président de MG France Claude Leicher de son coté confirmait que « les médecins sont ouverts à d’autres modes d’exercice comme se déplacer pour assurer des permanences de soins dans plusieurs communes. La question restant de prendre des mesures suffisamment incitatives pour leur donner l’envie d’exercer en médecine général et de venir accrocher leur plaque en milieu rural… »
Une première en Rhône Alpes
Et tandis que Alain Chabrolle soulignait que « les Baronnies Provençales auront été le premier territoire en Rhône Alpes à avoir souhaité prendre à bras le corps le problème de la désertification médicale en milieu rural », Claude Leicher nous confiait que « cette rencontre aura eu le mérite de mettre en présence les acteurs de terrains et les décideurs, de confronter les plans du gouvernement avec la réalité du terrain et d’espérer que les mesures à prendre, aujourd’hui devenus urgentes, en soient accélérées… »
Alain BOSMANS
Article publié dans l’Agriculture !drômoise » du jeudi 17 février 2011
Malaise chez les généralistes
Longtemps considérés come des privilégiés, les médecins généralistes on le sentiment d’être devenus aujourd’hui les parents pauvres de la médecine.
Les généralistes sont en train de devenir une «espèce en voie de disparition», selon l’expression de Claude Leicher, président national du syndicat des médecins généralistes de France qui décrivait vendredi dernier à Buis une situation alarmante. Les étudiants sont de plus en plus rares à choisir la médecine générale alors qu’il y a de plus en plus de départs à la retraite. Et parmi ceux qui choisissent cette discipline, moins d’un sur dix s’installe en libéral (seulement 8,6 % des diplômés des facultés de médecine décident aujourd’hui de visser leur plaque et de s’installer comme médecin libéral, généraliste ou spécialiste, en ville ou à la campagne). Par rapport à un poste salarié, le travail est beaucoup plus astreignant et beaucoup moins rentable financièrement que le salariat. Les généralistes, souvent surchargés de travail, se plaignent de voir leur acte dévalué symboliquement et financièrement par rapport aux spécialistes. Un médecin travaille 60 heures par semaine en moyenne (sources MG France) pour un revenu annuel moyen de 76 000 euros contre 200 000 pour un radiologue. Un chiffre, certes honorable, mais qui fait grincer les dents des généralistes qui invoquent leur niveau d’études et leurs responsabilités. A l’écrasante majorité, ils ont choisi d’exercer en secteur 1 (sans dépassements d’honoraires) au nom de l’accès aux soins pour tous. Et même si, après plusieurs années de revendications, les généralistes ont obtenu que les consultations passent de 22 à 23 euros, on est toujours loin des 70 € par consultation de certains spécialistes…
Certains praticiens craquent.
À force d’enchaîner le nombre d’actes, de multiplier les gardes, certains arrivent à un « burm out » et le taux de suicide dans la profession est l’un des plus élevés (14%, selon les syndicats). Si bien qu’un nouveau phénomène est apparu depuis quelques années: « le déplaquage » (fermer son cabinet de généraliste en retirant sa plaque). Aux alentours de 40-50 ans, de plus en plus de médecins font le choix de gagner leur vie autrement et ferment leur cabinet. Ils partent dans les hôpitaux, en maison de retraite, comme médecin-conseil… Le nombre de départs a progressé de 30% entre 2008 et 2009, passant de 3000 à 4000 médecins, et on attend une augmentation de 50 % pour 2011, passant à 6000. Alors qu’en parallèle, il n’y a que 300 à 400 installations par an en France. A ce rythme, les généralistes ne seront plus que 25 000 en 2025 et la majorité d’entre eux seront en ville…
Une mission sur l’avenir de la médecine de proximité
Alors pour calmer la grogne, Nicolas Sarkozy a chargé l’ex-ministre de la Santé Elisabeth Hubert, ancien médecin généraliste, de piloter une mission sur l’avenir de la médecine de proximité. Son rapport a été rendu le 26 novembre dernier. Elle prône une réforme de la formation, une meilleure coopération entre les professionnels de santé et une refonte du système de rémunération. Pour l’instant, les syndicats attendent de voir comment il sera appliqué. La nomination de Xavier Bertrand comme ministre de la Santé changera-t-elle la donne? Celui-ci a souligné après sa nomination l’attention « que le gouvernement entend porter à la médecine de proximité qu’il s’agit de moderniser, simplifier, faciliter ».
Alain Bosmans (source « Le quotidien du médecin »)
Article publié dans « L’Agriculture Drômoise » du jeudi 17 février 2001