Aprés l'envol des "Fauves", le retour des "Moines"


(Article du Dauphiné Libéré du 6 octobre 2003)

 

Disparu de nos montagnes depuis plus d’un siècle, le plus grand des rapaces d’Europe: le Vautour, fait une spectaculaire réapparition dans les Alpes du Sud. Entamé voila 10 ans à Rémuzat dans les Baronnies, le programme de réintroduction du "Vautour Fauve" connaît un exceptionnel succès et encourage le lancement d'un nouveau projet de réintroduction du 'Vautour Moine", plus rare et plus prestigieux encore.

(photo Christian Tessier)

L’oiseau géant (jusqu'à prés de 3 mètres d’envergure) est facilement identifiable grâce à son long cou recouvert d’un fin duvet et engoncé dans une collerette blanche. Depuis 1993, date de la réception des premiers "Vautour Fauve" à Rémuzat, sa silhouette en vol est devenu familière au dessus des impressionnantes falaises du Rocher du Caire qui domine le chef lieu de canton des Baronnies.


Les Vautours Fauves survolent désormais l'ensemble des massifs montagneux de la Drôme
(photo Christian Tessier)

A partir des 9 oiseaux qui y furent lancés en 1996 (après 3 années d'acclimatation captives) ce sont aujourd'hui quelques 150 "Vautours Fauves" qui volent sur l'ensemble des massifs montagneux du département et se reproduisent en liberté sur toutes les hauteurs du Diois, des Baronnies et du Vercors. A Rémuzat, Christian Tessier le naturaliste employé depuis 10 ans par l’association "Vautours en Baronnies", a répertorié 35 couples reproducteurs qui ont produit en liberté cette année 18 poussins. Un bilan qualifié unanimement par tous les spécialistes de "tout à fait exceptionnel". De toute évidence, le massif des Baronnies dans le sud de la Drôme constitue bien, avec ses nombreuses falaises, ses vents violents et son ensoleillement annuel important, un milieu écologique très favorable à la reproduction de ces "Fauves" aux caractéristiques si particulières.


Le rocher du Caire à Rémuzat d'où les vautours prennent leur vol.

C'est d'ailleurs pour saluer l'importance de ce succès qu'une forte délégation composée d'une quarantaine de naturalistes et d'ornithologues en provenance de toute l'Europe était récemment reçue à Rémuzat. Accueillis par Alain Moutonnet, président de "Vautours en Baronnies", les scientifiques et responsables des organismes ayant participé et soutenu le projet devaient, par la voix de Michel Terrasse vice président de la Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO) et principal initiateur de cette réintroduction en France, annoncer le lancement d'un nouveau programme de réintroduction d'une nouvelle espèce de vautours, encore plus rare et prestigieuse: le "Vautour Moine".


150 "fauves" ont été réintroduits dans la Drôme
(photo Christian Tessier)


Une espèce dont on sait qu'elle existait bel et bien dans les Baronnies au siècle dernier puisque des documents de l'époque font état d'un dernier spécimen qui fut retrouvé mort et exposé sur le marché de Nyons en 1848. Une espèce particulièrement rare, dont il ne restait voila quelques années que quelques oiseaux en Espagne et particulièrement fragile puisque, contrairement aux "Fauves" nichant en colonies dans des falaises abruptes, les "Moines" font leurs nids et pondent à la cime des arbres (voir l'article ci-dessous).


Visite des naturalistes à Rémuzat: Michel Terrasse, Raymond Faure, Roger Mathieu et Christian Tessier

Le programme de réintroduction du "Vautour Moine" prévoit deux sites de lâcher l'un à Rémuzat et l'autre dans le Verdon. Le professeur Résus Garzon, l'un des plus grands naturalistes espagnols devaient annoncer en cette l'occasion, au nom des autorités de son pays, le don par l'Espagne à l'association de Rémuzat d'une dizaine de "Vautours Moine" qui serviront à la réintroduction de l'espèce dans le sud de la France au début de 2004. Le but ultime du projet qui est porté par un ensemble de partenaires multinationaux est de reconstituer la population européenne de Vautours telle qu'elle existait sur un vaste ensemble de pays de l'Europe du sud au début du 19ème siècle.


Olivier Lannés et Christian Tessier sont tous deux employés à Rémuzat par "Vautours en Baronnies"

Ainsi donc, après un siècle et demie d'absence, les grands "Moines" vont faire leur retour dans les Baronnies pour le plus grand profit de leurs habitants qui voient ainsi s'enrichir la biodiversité de leur région. Les Baronnies sont en effet en voie de devenir en Rhône Alpes, une zone phare en matière de développement d'un tourisme naturaliste. La "Maison des Vautours" à Rémuzat, ouverte toute l'année, a accueilli quelques 15 000 visiteurs en 2002 et les différents campings, gîtes et hôtels de la région se félicitent du développement de ce nouveau tourisme ornithologique.


La "Maison des Vautours" à Rémuzat

Le projet reçoit d'ailleurs depuis son lancement le soutient financier et technique de partenaires multiples tant publics que privés: Public avec la participation de l’Union Européenne, du Ministère de l’Environnement, de la Région, du Département, des communes environnantes et du Syndicat d’Aménagement des Baronnies (SAB). Privé avec le parrainage du F.I.R. (fonds d’intervention pour les rapaces), de la Fondation "Nature et découverte", de la Fédération des chasseurs de la Drôme, des naturalistes de la F.R.A.P.N.A. 26 et des éleveurs ovins et caprins des environs dont les carcasses sont équarries par les vautours. A noter enfin que l'association "Vautour en Baronnies" qui emploi aujourd'hui deux naturalistes à plein temps, voit son fonctionnement entièrement auto financée par ses propres revenus (équarrissage, animations touristiques et vente d'objets divers).

Vautours: Mode d'emploi

(Article du Dauphiné Libéré du 6 octobre 2003)

Le vautour est un rapace qui vivait au siècle dernier dans tous les pays bordants la Méditerranée. Il était présent en nombre important (plusieurs milliers) sur tous les massifs de moyenne montagne du sud de la France. Les causes de sa disparition sont probablement liées à la destruction directe par le fusil après la Révolution Française et à l’empoisonnement par la strychnine à l’occasion des campagnes intensives d’élimination du loup. Espèce protégée depuis 1976, on peut observer aujourd’hui l'espèce "Fauve" dans les Pyrénées, les Cévennes, les Baronnies et les Gorges du Verdon tandis que la réintroduction des "Moines" est actuellement en projet (voir article ci-dessus). En vol, cet oiseau se reconnaît par son envergure imposante qu'il utilise pour se déplacer en vol plané. Armé d’un bec recourbé et de puissantes serres cet imposant rapace est parfaitement inoffensif puisque ce charognard nécrophage se nourrit exclusivement d’animaux morts. Les vautours vivent en couple et n'élèvent qu'un jeune par an, faisant parfois une deuxième ponte si la première a échouée.

Le Fauve

C’est l’un des plus grands rapaces de France, son envergure varie de 2,35 m à 2,65 m pour un poids de 7 à 11 kg. Il est caractérisé par ses couleurs brune et crème, sa tête fine au front plat et son long cou, garni d’un duvet blanc. Au vol, le vautour fauve se reconnaît à sa très grande taille, à ses ailes longues, larges, arrondies à l’arrière, aux extrémités digitées et relevées vers le haut. Sa queue est très courte. Le vautour fauve niche en colonies, dans des falaises abruptes ou de grands rochers escarpés. Ce rapace se reproduit pour la première fois à l’âge de 4 ou 5 ans. Les couples sont souvent unis pour la vie. Les vols nuptiaux sont effectués à proximité des sites de reproduction et des dortoirs. Le couple vole de façon synchrone le long des parois rocheuses, l’un des partenaires légèrement au-dessus de l’autre. Les accouplements ont lieu sur le nid ou à proximité de celui-ci, dès le mois de décembre. Le vautour fauve niche très tôt : l’unique œuf est pondu entre la fin décembre et la mi-mars. Le nid est construit d’un amas sommaire de branches, deux à trois semaines avant la ponte. Les deux adultes participent à la construction de celui-ci, à l’incubation et à l’élevage du jeune.

Le Moine

Avec 2,65 à 2,85 m d’envergure il est un peu plus grand que le vautour fauve, mais également plus léger et pèse en moyenne de 7 à 10 kg. Sa coloration très sombre renforce sa stature imposante. L’apparente “tonsure” qu’il a sur le dessus de la tête et sa robe foncée, lui confèrent son nom. En vol, le vautour moine étonne par son envergure et sa parfaite maîtrise du vol plané. En l’air, il se déplace sans effort, de manière souple et glissante, les ailes en apparence immobiles. Sa tête dépasse peu à l’avant du corps, sa queue courte est légèrement pointue. Ses ailes sont plus longues et plus larges que chez le vautour fauve. Le vautour moine niche dans les arbres en colonies lâches. Il construit son nid à la cime d’un arbre, un pin sylvestre ou un chêne vert, à flanc de coteau, entre 3 et 20 m du sol. Les couples commencent à se reproduire vers 4 ou 5 ans. Les parades aériennes commencent de janvier à mars, en même temps que la construction du nid. Les accouplements ont lieu dans le nid ou dans ses abords immédiats. La femelle va pondre un unique œuf que les deux partenaires vont couver pendant 55 jours environ. Les adultes sont sédentaires, ils restent toute l'année à proximité de leur site de reproduction.

"La Maison des Vautours" de Rémuzat propose toute l'année sur simple réservation téléphonique des sorties de découverte et d'observation des vautours et du milieu naturel. Renseignements: tel : 04 75 27 81 91 – e-mail: vautourbaronnies@aol.com

Texte et Photos d' Alain Bosmans - Le TAM-TAM DES BARONNIES
www.tamtamdesbaronnies.com
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