La
mémoire d'un Ancien Combattant des Baronnies
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La voix est grave, profonde, chaleureuse, abondante, habituée aux commandements, elle souffre difficilement d'être interrompue. Mais à vrai dire lorsque le Colonel Pez commence à raconter sa vie, le récit est tellement passionnant que personne, en dépit des heures qui s'écoulent, ne songe à l'interrompre. René Pez chez lui et devant la stèle du Maréchal Juin qu'il aura contribuée à mettre en place pour honorer sa mémoire. |
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René Pez est né à Mévouillon en 1920 d'une très ancienne famille d'agriculteurs des Baronnies dont on retrouve les traces dans les archives régionales depuis 1640. A Mévouillon il passe une enfance heureuse qui se poursuit au cours complémentaire de l'école du Buis. Comme tous les enfants de cette époque, il est élevé dans le souvenir poignant de la terrible " Grande guerre " qui vient de s'achever à sa naissance et où deux de ses oncles ont laissé leur vie tandis que son père y sera deux fois blessé. A cause ou malgré cela, il s'engage à 18 ans dans l'armée. Tout d'abord affecté en 1939 au 504ème régiment de char de combat de Valence, la guerre le surprendra chef de char avec le grade de brigadier-chef entre Sarguemine et Sedan. Blessé en mai 1940, il est évacué sur l'arrière et se retrouve à Toulouse puis, après une convalescence, est affecté au 18ème R.I. de l'armée de l'Armistice à Tarbes. Volontaire pour l'Afrique, on le retrouve successivement à Oran, Casablanca, Dakar et finalement à Bobo-dioulasso dans un régiment de tirailleurs sénégalais où il est chargé (en plein désert et dans des conditions homériques) d'assurer la remise en état et la maintenance du matériel militaire roulant en provenance de Bamako. En novembre 42, après le débarquement américain, il est volontaire pour retourner en Afrique du Nord former les divisions blindées françaises qui participeront plus tard au débarquement de Provence. A Rabat, affecté au 1er Chasseur d'Afrique, il retrouve 3 camarades du Buis, Jacques Bonfils, Pierre Montaud et Aubert. Devenu entre-temps aspirant, il participe au débarquement de Provence début septembre 43 et se bat héroïquement pour la libération de la France avec la 1ère D.B. qui appuie la 9ème division d'infanterie coloniale constituée en grande partie de sénégalais et autres ressortissants africains. Après la libération de Mulhouse, de Colmar, la traversée puis la remontée du Rhin jusqu'à Constance et le Vurstenberg, René Pez finit la guerre avec le grade de lieutenant. Le lieutenant Pez est alors envoyé à Strasbourg puis à Gien où il prend la direction des ateliers de réparation d'engins blindés jusqu'en 1951. Auparavant, il se marie en octobre 45 au Buis à l'occasion d'une permission avec Hélène née Brissac , la fiancée qui l'aura attendue durant toute la guerre et qui lui donnera 2 garçons (dont l'un, Gérard, est l'actuel maire de Vercoiran). Mais la vie d'un militaire de carrière en ce milieu du 20ème siècle est tout sauf un long fleuve tranquille. Et en 1951, alors qu'il est devenu capitaine, l'armée française envoie René Pez à l'autre bout du monde, en Indochine pour prendre le commandement de la 1ère compagnie de réparation d'engins blindés à Saïgon. Bateaux à fond plats, engins amphibies, automitrailleuses, chars légers, la mécanique de tout ce qui se déplace sur le territoire de la péninsule indochinoise n'a alors plus aucun secret pour René Pez. Il sera en particulier responsable de l'incroyable opération qui aura consisté à démonter, transporter et remonter 3000 kms plus loin, 15 chars légers avant la bataille de Dien Bien Phu. Rentrant en France en novembre 53 (après avoir fait partie pendant 3 mois d'une mission militaire française en Australie), René Pez devient professeur à l'école du matériel de l'Armée de Terre à Bourges. Nommé commandant, devenu ingénieur des Armées sur concours, il occupe pendant 2 ans les fonctions de directeur de l'établissement du matériel de Valence avant d'être affecté en Algérie comme directeur du matériel de l'Est Saharien jusqu'en octobre 63. A ce poste il sera chargé notamment de rapatrier l'équipement et d'effectuer le transfert des bâtiments militaires aux nouvelles autorités algériennes. De retour à Bourges, puis au détachement d'inspection de Lyon, il se décide enfin à quitter l'armée en 1965 pour se consacrer à son épouse et à ses enfants qui avaient trop longtemps souffert de son perpétuel éloignement. René Pez entame alors une carrière civile chez Berliet où ses multiples connaissances et expériences des mécaniques et véhicules, acquises pendant 30 ans dans l'armée, le prépare à devenir chef du service de documentation aux méthodes de réparation de cette société. René Pez est alors lieutenant colonel et il restera 15 ans chez Berliet jusqu'à sa retraite civile qu'il prend à 60 ans en 1980. De retour au Buis, devenu veuf en 1986, il consacre son temps à remettre en état les deux fermes familiales dont il a hérité et qu'il met à la disposition de ses enfants. En 1989, au décès de Maurice Bonfils, il est sollicité pour reprendre le flambeau de la présidence de l'Association des Anciens Combattants du Buis. Il s'y consacrera pendant 10 ans avec le dynamisme et la rigueur que l'on sait jusqu'en ce début d'année, lorsqu'il décide à son tour de laisser la présidence à plus jeune que lui (voir notre article du 2 février courant). Aujourd'hui, celui que ses camarades anciens combattants appellent avec respect et admiration le Colonel Pez, celui qui aura reçu 8 médailles dont celle de la Légion d'Honneur, du mérite vietnamien et une citation à l'ordre de la division d'Indochine, se consacre désormais à ses souvenirs. Et cette voix grave, profonde, chaleureuse, abondante est celle du souvenir d'un ancien combattant des Baronnies au travers du siècle écoulé. Fasse que longtemps encore dans toutes les familles des Baronnies et à toutes les générations de ce siècle qui commence, on continue de l'entendre. Alain Bosmans Changement d'équipe aux Anciens Combattants René Pez laisse la main... (Article du Dauphiné Libéré du 2 février 2000)
Les anciens combattants de Buis et leurs hôtes devant la mairie à la sortie de l'Assemblée Générale du 29 janvier 20000 C'est avec quelque solennité que, samedi matin dans la salle d'honneur du conseil de la mairie, s'est tenue l'Assemblée Générale de l'Association des Anciens Combattants de Buis les Baronnies. Une solennité renforcée par la présence du maire de la commune Jean Pierre Buix, du député de la circonscription Michel Grégoire, du colonel André président de l'Union Fédérale Drômoise des Anciens Combattants et de M. Bouly directeur à Valence de l'Office départemental des Anciens Combattants de la Drôme. Une solennité enfin qui était due au fait que c'était la dernière Assemblée Générale présidée par René Pez qui avait décidé de prendre sa retraite de président et dont le bureau devait être entièrement renouvelé en cette occasion. Aussi c'est, avec 35 adhérents, la quasi totalité des membres qui étaient présents samedi matin pour entendre le président Pez rappeler dans un long discours le bilan de ces dix dernières années. C'est en effet en 1989 lorsqu'il en prend la présidence, entouré par une solide équipe constituée de Georges Bec, Yves Jaegly et Jean Tourniaire (hélas décédé la veille de cette réunion), que René Pez fait acquérir à l'association une existence légale qu'elle n'avait pas encore. Ces dix années de présidence auront été marquées par une double exigence de dynamisme et de rigueur. Un dynamisme qui se traduira par le développement de l'association dont le nombre d'adhérents passera de 20 à 41 membres aujourd'hui (malgré les 16 décès qui ont endeuillé l'association durant ces années). Un dynamisme qui se manifestera dans l'organisation des activités visant à nouer et resserrer des liens d'amitiés entre les Anciens Combattants de la région : repas, voyages, actions de secours auprès de camarades en difficultés, défenses des droits des anciens combattants auprès des autorités départementales compétentes, remise de la Croix du Combattant aux nouveaux adhérents, etc… Cette décennie aura également été marqué par la rigueur dans les célébrations des cérémonies officielles au monument aux Morts. Rigueur pour affirmer le respect de la mémoire de ceux qui sont morts pour la France ou disparus après les combats (avec la mise en place de plaque tombale sur la tombe des Anciens combattants). Rigueur dans les actions en vue de développer le devoir de mémoire chez nos concitoyens (avec entre autre l'inauguration de la stèle du Maréchal Juin en 1999 ou encore l'exposition se rapportant aux conflits du siècle présentée en 98 dans les écoles et dans le cadre du forum des associations). Après 10 années d'un magnifique travail, la place est désormais faite à une nouvelle équipe qui présidera aux destinées de l'association. Ont en effet été désigné à l'unanimité président Yves Jaegly, Vice président Jean Marie Reynaud, trésorier Adolf Burck, secrétaire adjoint Georges Faravel, tandis que Roger Engrand reste porte drapeau. En clôture de cette réunion, Michel Grégoire, Jean Pierre Buix, le colonel André et M. Bouly devait successivement prendre la parole. Le premier pour souligner l'importance du travail réalisé par les associations d'Anciens combattants dans le nécessaire devoir de mémoire qui permet de mieux comprendre et appréhender ce siècle qui commence. Le second pour se féliciter de l'excellence de la collaboration entre la commune et ses anciens combattants. Le Colonel André quant à lui devait déclarer que " On voudrait bien que toutes les sections d'Anciens Combattants soient comme celle de Buis… " avant que M. Bouly (qui se déplaçait pour la première fois à Buis) ne prenne la parole au nom du préfet pour présenter les services offerts par l'Office de Valence aux Anciens Combattants du département. Tous évidemment rendirent hommage au remarquable travail accompli pendant 10 ans par l'équipe sortante et son président René Pez. Une photo de famille sur le perron de la mairie suivi d'un apéritif et d'un repas convivial terminaient en beauté cette belle réunion. Alain Bosmans |
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