COPAINS DE JAZZ
 
(Article du Dauphiné Libéré 22 août 1999)
 
    
Jean Jacques Taïb au saxo - Alain Brunet et Luc Fenoli - Alain Brunet à la trompette
    
Manhu Roche à la la batterie - Alain Brunet avec le big Band danois - Le Jomfru Fanny big Band
 
Un festival est né : Pendant 3 jours la bourgade du sud de la Drôme aura vécu à l’heure du jazz et le pari d’une bande de vieux copains normaliens d’organiser un festival de Jazz à Buis les Baronnies aura été tenu. Dans un parfum d’espoir !

        Un festival c’est comme un grand vin. Il n’a d’avenir que s’il a une âme. On peut prédire sans se tromper que celui qui vient de naître à Buis les Baronnies, ce premier « Parfum de Jazz » a déjà de la bouteille tant son âme fut présente et noble durant ces trois jours de fête. Son âme c’est celle des copains d’abord. Des copains de jazz qui auront fait vibrer la bourgade des Baronnies au rythme d’une superbe complicité, une connivence fraternelle, une passion partagée pour la même musique.

        On connaît l’histoire de ces anciens élèves de l’école normale d’instituteurs de Valence passionnés de Jazz dans les années soixante qui se retrouvent 35 ans après pour organiser bénévolement un festival à Buis les Baronnies. Les uns sont devenus des musiciens de renommée internationale comme Alain Brunet ou Jean Jacques Taïb, d’autres d’excellents amateurs comme André Bousquet, les autres enfin sont restés de fins connaisseurs et des amis fidèles comme Jean Pierre Buix, le maire instituteur du Buis, Jean Pierre Espieux, l’adjoint au maire directeur de l’école du Buis et tous ces copains que la vie a éparpillés : Olivier Clary, Patrick André, Jacky Chastagnet, Jacky Carteaux, Maurice Lagouy, Gérard Bravas, Bernard Chambre, Bernard et Gyslaine Rias, Annie Chiffre et Marcel Ronat. Et pour fêter ces retrouvailles, trois jours de concerts et de « bœufs » improvisés sous les platanes et tilleuls du bord de l’Ouvèze ne furent pas de trop.

        Jeudi soir le premier concert était donné en présence de Michel Faure, Maire de Nyons et vice-président du Conseil Général chargé des affaires culturelles, devant plus de 300 spectateurs enthousiastes réunis dans le cloître du couvent des Dominicains. Cela devait être un quintet mais ils finirent par être 9 sur scène… Alain Brunet à la trompette, Jean Jacques Taïb au saxo, Manhu Roche (le batteur de Michel Petruciani), un jeune guitariste Luc Fenoli (qui sort tout juste du conservatoire de Paris où il a obtenu l’un des premiers diplômes de la toute nouvelle classe de jazz et qui s’apprête à rejoindre les Etats-Unis pour y faire d’autres rencontres musicales), André Bouquet (guitariste et chanteur Grenoblois), Reine Sophie Acadine (une jeune chanteuse de la Réunion) et les danois Henrik Carstens à la contrebasse et David Seffinger aux percussions. Enfin la saxophoniste chanteuse Hanne Roemer, leader du grand orchestre danois « Jomfru Fanny Big Band ». Si les musiciens français se connaissaient fort bien et avaient une longue habitude de jouer ensemble, ce n’était pas le cas des danois qui étaient arrivés du Danemark en car l’après midi même et n’avaient par conséquent pas eu le temps de faire la moindre répétition avec les jazzmen français. Las, quelle importance ! Prouvant une fois de plus que le jazz est bien une affaire de « feeling » qui utilise un langage universel, le concert fut superbe et nombreux furent les spectateurs enthousiastes qui se demandèrent ce qui aurait bien put advenir s’ils avaient répété ensemble avant…

        Le lendemain vendredi soir, un nouveau concert était donné dans les jardins de la mairie au clair de lune d’une magnifique soirée d’été devant un public aussi nombreux que la veille. Au programme le fameux Big Band danois « Jomfru Fanny » originaire de la province du sud Jutland. Un grand orchestre de jazz traditionnel de 20 musiciens avec une chanteuse, Esther Larsen, un chef d’orchestre saxophoniste ténor, Hanne Roemer, une section rythmique de cinq musiciens et pas moins de 13 cuivres qui interprétèrent pendant plus de deux heures avec énergie et rigueur un vaste répertoire des meilleures mélodies du genre. Le déplacement du Big Band danois vers Buis les Baronnies avait été organisé à l’instigation de l’un des leurs, Sten Felter qui possède une résidence secondaire à Buis et qui, de ce fait, s’était lié d’amitié, depuis de longues années, avec de nombreux musiciens Drômois et amis buxois. Encore une affaire de « copains de jazz » bien sûr !

        Un troisième concert enfin (gratuitement offert par les organisateurs) réunissait hier soir sous les platanes de la place du Quinconce tous les musiciens présents à ce festival pour une fameuse Jam-Session qui s’est terminée fort tard dans la nuit et que les musiciens tout comme les spectateurs par ne sont pas prêts d’oublier.

        Oui décidément, un festival est né, un peu comme dans la chanson « Une étoile est née… » Le festival de jazz de Buis les Baronnies est né de la connivence de ces « copains de jazz », anciens potaches d’une école normale, unis par la passion commune pour cette musique planétaire qui aboli les frontières. A ce titre il possède déjà une âme, ce qui est beaucoup. Il lui faut maintenant un corps, des troupes, une mobilisation populaire des buxois derrière ce qui doit devenir leur affaire, leur festival.

        Mobilisation sans laquelle il est à craindre que ce « Parfum de Jazz 99 » risque de n’avoir été l’espace d’un été qu’une admirable bouffée d’amitié.

        Alain BOSMANS