"Halte à la désertification des campagnes"

(Article du Dauphiné Libéré du 21 mars 1999)


"De 1992 à 1998, 146 000 exploitations agricoles ont disparu en France..."

L’Assemblée Générale du MODEF de la Drôme s’est tenue samedi dans le village de Lachau, en plein Séderonnais, aux confins de l’arrière pays Drômois. Un lieu hautement symbolique de l’action que poursuit ce syndicat d’agriculteurs depuis 40 ans.

        Une cinquantaine d’agriculteurs venant de tous les coins du département, militants du MODEF, se retrouvaient samedi matin devant la salle des fêtes de Lachau pour participer à la 32 ème Assemblée Générale du MODEF de la Drôme. Parmi eux, le député Michel Grégoire qui répondait à l’invitation de Georges Reynaud, président départemental et de Serge Lépine, secrétaire national du syndicat agricole. Le choix de ce village du Séderonnais, le plus excentré possible puisque aux frontières avec les départements des Hautes Alpes et des Alpes de haute Provence, n’est, sans nul doute, pas du au hasard. Le syndicalisme paysan y est en effet solidement implanté depuis toujours et la région constitue selon Georges Reynaud « un bastion de l'agriculture progressiste ». Il suffit de savoir en effet que si, sur l’ensemble du département, la liste commune « MODEF - Confédération Paysanne » a recueilli 33% des suffrages aux dernières élections de la chambre d’agriculture en 95, elle représente prés de 70% des agriculteurs dans le Séderonnais…

        Il faut dire que être paysan dans le Séderonnais est aujourd’hui un métier difficile. Vivant sur de petites et modestes exploitations, éleveurs ou arboriculteurs dans une zone montagneuse, les agriculteurs sont de moins en moins nombreux chaque année à être le dernier rempart contre la désertification qui menace ici dangereusement l’environnement. Soucieux de « répondre de manière volontariste aux besoins d’une agriculture familiale à taille humaine » le MODEF, dans son rapport d’activités de l’année 1998, revendique la participation ou l’organisation de plusieurs actions revendicatrices allant en ce sens tant à Valence, Avignon, Tulle ou encore Nyons. On se souvient en effet ici du spectaculaire soutient syndical apporter à un éleveur du Séderonnais poursuivit pour dépôt de fumier dans des conditions illicites. Une action que Michel Grégoire devait juger exemplaire de l’incompréhension et du fossé qui sépare désormais de plus en plus le monde rural des autorités et décideurs par trop urbanisés.

        Georges Reynaud quant à lui, dans un rapport d’orientation, eu l’occasion de développer deux thèmes devenus antagonistes : La Loi d’Orientation Agricole (L.O.A) (pour laquelle le syndicat à beaucoup investi dans un travail de réflexion et d’amendement) est considérée, telle qu’elle a été votée en première lecture, comme « offrant un véritable tournant pour la politique agricole ». Les C.T.E (Contrat Territorial d’Exploitation) en particulier sont jugés favorablement dans la mesure où ils permettront « la prise en compte de l’acte de production accompagné des activités utiles à l’espace rural, à l’environnement et à la société ». Mais poursuit Serge Lepine, « alors que la France, par le biais de la L.O.A., s’efforce à mettre en œuvre une politique agricole plus soucieuse de l’homme et de son environnement, de la reconnaissance du travail paysan, de l’emploi et de la qualité des produits, le projet de réforme de la P.A.C. (Politique Agricole Commune) va à l’encontre de ces objectifs ». Très ferme en effet sur cette question, le MODEF rejette catégoriquement « le compromis virtuel sur la PAC qui s’est dégagé lors de la réunion des ministres de l'Agriculture qui signifierai la mort de centaine de milliers d'exploitants familiaux qui ne pourront résister aux effets d’une baisse de 15 à 20% des prix ». Le MODEF par ailleurs salue « la fermeté du ministre de l’Agriculture qui n’a pas donné son aval à cet accord et attend du Président de la République et du 1er ministre la même fermeté pour refuser ce projet de réforme de la PAC et exiger un changement radical d'orientation lors du sommet européen des 25 et 26 mars prochain ».

        Le débat qui suivi permis à plusieurs intervenants d’exprimer les préoccupations des agriculteurs de la Drôme en ce qui concerne en particulier la chasse et les dégâts de sangliers. On reparla également de l’affaire de la « verbalisation du tas de fumier d'Eyagalayes » pour laquelle l’intéressé attend toujours le jugement en délibéré (le 7 juin) avant de réagir éventuellement. La crise de la viande bovine, la mévente des peaux de bêtes par les abattoirs français qui ne trouvent plus de débouchés, et les conditions d’accès aux futures C.T.E. furent également abordés par Michel Grégoire qui eut l’occasion de fournir les explications et le point de vue du législateur. Enfin Yves Bec, président de l’Association Départementale des « Gîtes de France » s’exprima pour présenter les activités de son association, tout en insistant sur la forte demande d’un développement touristique en milieu rural et sur l’intérêt de celui-ci en terme d’apport complémentaire aux exploitants agricoles.

        Après que le conseil d’administration du syndicat ait été renouvelé, il ne restait plus au secrétaire national qu’à inviter les militants à venir nombreux participer aux cérémonies du 40 ème anniversaire du MODEF qui se dérouleront à l’échelle nationale le 8 avril à Sarrians (Vaucluse). Un joyeux apéritif suivi d’un non moins délicieux repas « Au vieil Hôtel » tout proche devait clôturer à Lachau cette Assemblée Générale pour l’année 99 du MODEF de la Drôme.

         Alain BOSMANS