Conflit à l'école de Séderon
 
 
(article du Dauphiné Libéré du 8 novembre 1998)
 
 
 
 Pascale Audibert, directrice de l'école et  Hélène Remuzat,  présidente du  SIVOS  -  Les locaux scolaires sont en effet d’une évidente vétusté.
 
 
Handicapée depuis 7 ans par un conflit intercommunal, la gestion de l’école de Séderon est désormais au bord du gouffre. Après la mobilisation que l’on a connu pour sauver leur gendarmerie, les élus, parents d’élèves et enseignants de Séderon, refusant de se laisser marginaliser au fin fond de leur « arrière pays », menacent aujourd’hui d’occuper l’école...

        Le conflit ne date pas d’hier et s’il prend aujourd’hui des proportions inquiétantes, c’est sans doute qu’il n’a déjà que trop duré : 7 ans exactement. A l’origine, il y a la fermeture des deux écoles de Mévouillon et Lachau (du fait de la baisse des effectifs scolaires dans le Séderonnais) et le nécessaire regroupement en 1992 sous l’égide d’une école unique à Séderon, le chef lieu de canton, des enfants des dix communes environnantes. Un SIVOS (Syndicat intercommunal à vocation scolaire) est alors formé regroupant le 9 communes de Ballons, Eygalayes, Mévouillon, Séderon, Vers sur Méouge, Izon la Bruisse, Barrets de Liourne, Monfroc et Villefranche le Château. Neuf communes donc, et non pas dix comme cela aurait dut être, car les élus de Lachau, mécontents de la fermeture de leur école (dont ils pensaient pouvoir conserver une classe dans le cadre d’un éclatement des cycles) refusent depuis l’origine d’adhérer au SIVOS.

        Contraint d’envoyer ses enfants (trois élèves aujourd’hui) à l’école de Séderon, la commune de Lachau décide cependant de ne participer que partiellement au financement de l’école intercommunale. Alors que toutes les autres communes membres du SIVOS calculent leur participation à raison de 80% sur le nombre d’enfants scolarisés et 20% sur le nombre d’habitants par commune, celle de Lachau elle, n’accepte de participer qu’à raison d’un forfait pour chacun de ses enfants effectivement scolarisé dans l’année.

        Hélène Remuzat, conseillère municipale à Séderon et présidente du SIVOS explique ainsi qu’en 1997, Lachau n’aura payé que 14 881 F pour trois enfants au lieu des 23 367 F qui auraient du être réglés en vertu des règles du SIVOS qui s’imposent à toutes les autres communes adhérentes. Le maire de Lachau, René Tremori, quant à lui nous a dit « être prêt à adhérer immédiatement au SIVOS à condition que l’on change les règles de répartition des charges de fonctionnement de l’école et que celles-ci se fassent uniquement au prorata du nombre d’élèves scolarisés dans chaque commune »…

        Le vrai problème réside dans le fait que ce dialogue de sourds (dont il n’est pas interdit de penser qu’il tire ses origines de conflits personnelles et politiques fort anciens…) dure depuis 7 ans, et que chaque année, les autres communes doivent donc éponger les arriérés de cotisations dues afin d’équilibrer le budget du SIVOS. Alors, à la suite de la dernière réunion du Syndicat, en octobre, les 9 communes ont décidé de ne régler, elles aussi, leur participation qu’à proportion du nombre d’enfants (comme Lachau) et seulement au nombre d’enfants. Les conséquences d’une telle situation sont évidemment aussi prévisibles que redoutées. Il est certain en effet que, comme le souligne le tract de mobilisation, distribué par les parents d’élèves en fin de semaine dans tout le canton, le SIVOS ne sera désormais plus en mesure de faire face aux charges financières de l’école. Le fonctionnement de la cantine, les frais de personnel, le règlement des factures de chauffage et d’électricité risquent fort de ne plus pouvoir être honorés, sans parler du projet de rénovation ou de reconstruction d’une nouvelle école qui est désormais et par conséquent gelé.

        Car il se trouve en effet que, pour ne rien arranger, l’école de Séderon est située dans un bâtiment ancien qui soulèvent depuis plusieurs années des problèmes récurrents de vétusté et d’espace. Le nombre d’enfants scolarisés est de fait en constante augmentation dans le canton, passant de 55 en 96, à 63 en 97, et 69 en 98. A tel point que cette année, les enfants de deux ans (au nombre de 8) n’ont put être acceptés et sont en attente pour l’année prochaine… Les locaux scolaires eux, pendant ce temps, continue de se dégrader dans l’exiguïté…

        Alors à nouveau, dans le Séderonnais, la colère gronde parmi les parents d’élèves où l’on constate qu’après la gendarmerie (dont on craint encore ici de voir la brigade quitter le chef lieu de canton), c’est maintenant au tour de l’école de se trouver menacée dans son existence même. De nouveau à Séderon, ils sont nombreux ceux qui ne croient plus aux discours officiels sur « l'importance de l'arrière pays » et qui éprouvent le sentiment frustrant d’avoir été, une fois de plus, « oubliés » par les autorités. Et c’est afin de se rappeler à leur bon souvenir, que le SIVOS, les parents d’élèves et les enseignants ont fixé au 16 novembre la date butoir pour qu’une solution satisfaisante soit trouvée par l’administration. Au delà, l’école sera occupée et la mobilisation autour des enfants du Séderonnais sera totale.

        A Nyons, les services de la sous préfecture font savoir que la situation est examinée avec attention et l’on compte faire œuvre de médiation afin de trouver, en liaison avec l’inspection d’Académie, une solution acceptable par tous.

         Alain BOSMANS
 

Cahier fermés et rideaux baissés
(article du Dauphiné Libéré du 17 novembre 1998)
 
Pascale Audibert, directrice de l'école et  Hélène Remuzat,  présidente du  SIVOS
 
Mobilisation, détermination, démonstration, la population de Séderon, les parents d’élèves ainsi que les élus des neuf communes membres du SIVOS ont tenu parole. L’école de Séderon est bloquée et le maire de Lachau est au pied du mur.

        Tandis que les commerçants du chef lieu de canton fermaient leurs boutiques pour la journée en signe de solidarité donnant à la bourgade des allures de ville morte, un rassemblement tout à fait inhabituel avait lieu lundi matin devant et dans l’école de Séderon. Dés la première heure, Hélène Remuzat, présidente du SIVOS (Syndicat Intercommunal à Vocation Scolaire) et Marie Claire Bertrand, déléguée des parents d’élèves annonçaient que l’école était désormais privée d’électricité et de chauffage, que les services de cantine ne seraient pas assurés et que l’école était occupée jusqu’à nouvel ordre. Il s’agissait de mettre à exécution la menace contenue dans le tract du 3 novembre émanant du SIVOS et des parents d’élèves, mettant en demeure la commune de Lachau de participer à la gestion financière de l’école dans les mêmes conditions que les 9 autres communes (notre article du 8/11/98).

        Or malgré les nombreuses tentatives de médiation qui se sont multipliées en fin de semaine dernière, émanant notamment du sous préfet de Nyons, Marc Paganel, il apparaissait lundi matin que l’on avait fort peu avancé dans la voie d’une résolution du conflit. Parmi la centaine de personnes présentes dans l’école, on notait la présence de René Enguent, inspecteur départemental de l’Education Nationale, Michel Cossantelli, Conseiller Général du canton, du docteur Christian Beaume, maire de Séderon ainsi que de nombreux élus des 9 communes concernées. Pendant toute la matinée, tant devant les parents d’élèves que devant les maires et délégués du SIVOS, le maire d’Eygalayes, Jacques Laurent devait se faire l’interprète du conseil communal de Lachau (dont aucun membre n’était présent) en annonçant que dans un esprit de conciliation, cette commune avait accepté de rembourser les arriérés des emprunts précédemment contractés par le SIVOS et qu’ils étaient prêt à envisager la constitution d’un fond de solidarité.

        Entre-temps la plupart des enfants avaient quittés l’école devant la perturbation résultant de cette occupation. Une nouvelle réunion dans l’école à laquelle participaient cette fois le maire de Lachau, René Tremori accompagné de deux conseillers, permettait de renouer le dialogue. En milieu d’après-midi, à l’issue de cette ultime négociation, le SIVOS proposait de revoir le calcul de participation des communes dans le sens d’une plus grande équité en échange de quoi la commune de Lachau acceptait d’adhérer au syndicat sans autres conditions particulières. Cette dernière décision devant être confirmée après délibération du Conseil Municipal de Lachau, le SIVOS et les parents d’élèves maintiennent leur mobilisation et l’école de Séderon continuera d’être occupée demain mardi 17 novembre.

         Alain BOSMANS